Doublé Critique l Jurassic World : Le Monde d’Après
Camille Griner et Adrien Van Noort ont découvert le troisième volet de la saga Jurassic World avant sa sortie. Dinosaures en liberté et action à gogo, Jurassic World : Le Monde d’Après s’offre un doublé critique, avec quelques spoilers, après avoir enchanté autant qu’agacé nos deux rédacteurs.
LE PITCH : Quatre ans après la destruction de Isla Nublar, les dinosaures font désormais partie du quotidien de l’humanité toute entière. Un équilibre fragile qui remet en question la domination de l’espèce humaine puisqu’elle doit maintenant partager son espace avec les créatures les plus féroces que l’histoire n’ait jamais connues.
L’homme qui murmurait à l’oreille des dinos
Après Jurassic World : Fallen Kingdom (2018), qui m’avait largement ennuyé, je n’attendais rien de ce nouvel opus malgré un engouement certain à l’idée de contempler à nouveau des dinosaures sur grand écran. Et à ce niveau-là, je dois dire que j’ai été aussi rassasiée qu’un tyrannosaure après avoir englouti un tricératops dodu. Passée cette orgie jouissive de bestiaux préhistoriques, on est ravi du retour bienvenu de Dern, Neill et Goldblum, qui nous rappelle que leurs personnages étaient bien plus attachants que ceux de la nouvelle génération, même si ce trio emblématique est ici souvent cantonné à ses envies ambivalentes de câlins entre vieux potes (et plus si affinités) et lancement de piques pour raviver leur concours d’égo déterré pour l’occasion. Le grand vilain scientifique (Campbell Scott) de ce troisième volet n’est par ailleurs pas en berne et intéressant dans son traitement. Avide et méchant, il est aussi physiquement très proche de Tim Cook, option looser introverti en bonus, ce qui ne manque pas de nous décrocher des (sou)rires régulièrement. Jusqu’ici tout va plutôt bien.
Pourtant, je me suis rapidement questionnée sur la véritable utilité du personnage d’Owen Grady (Chris Pratt) dans l’intrigue. S’il manie toujours bien les haltères, les grosses motos et les répliques prévisibles, son nouveau passe-temps dans Jurassic World : Le Monde d’Après est de tenter de renouer coûte que coûte avec son passif de dresseur de raptors en brandissant constamment sa main gauche face à des gueules aux dents plus ou moins acérées et hostiles. Grady, un padawan bancal fortement convaincu par l’étendue de sa Force ? Rien n’est moins sûr, puisqu’il n’a par exemple pas compris que son ex-copine vélociraptor vit aujourd’hui plus heureuse que jamais en pleine nature. On se serait bien passé de l’homme qui croit murmurer à l’oreille des dinos, mais aussi de certaines longueurs et séquences aux coupes douteuses, pour que le divertissement soit total.
Camille Griner
Moto, Dino, Dodo
Jurassic World 3 est un peu frustrant. Après une longue introduction composée, entre autres, d’images de cartes postales d’une Amérique profonde où la nature a repris ses droits, de champs ravagés par des sauterelles génétiquement modifiées, de vallées enneigées occupées par des dinosaures fougueux et d’un enclos à contrebande de dinos, le film s’enlise dans une repompe assumée du premier Jurassic Park. En effet, l’intrigue se circonscrit dans un Cupertino (municipalité fief d’Apple) paléontologique qui ne prend pas la peine de cacher ses similitudes avec le parc du film original. Une fois passée la séquence d’action sympathique à Malte, vous apprendrez qu’en plus d’être une des capitales de l’évasion fiscale, l’archipel est aussi le centre névralgique du trafic des êtres vivants, des dinosaures aux enfants clones. A partir d’ici, les anciens Alan Grant (Sam Neil), Ellie Sattler (Laura Dern, rayonnante) et Ian Malcolm (Jeff Goldblum, trop heureux d’être présent), et les nouveaux Owen (Chris Pratt) et Claire (Bryce Dallas Howard) se retrouvent sans querelle dans une double mission d’infiltration-exfiltration un poil ronflante : sauver les espèces menacées, les humains ainsi que la jeune Maisie, une clone adoptée par Owen et Claire, de l’extinction. Heureusement, ils doivent faire face au docteur Lewis Dodgson qui campe à la perfection un simili Steve Jobs pathétique.
Avec la promesse globale du « World » de cette nouvelle trilogie, on pouvait au moins espérer une séquence fun en ville, avec un T-Rex destructeur dans une mégalopole. Malheureusement, on l’attend encore. Plus on avance, plus la copie ressemble à l’original, avec un dernier quart d’heure allant même jusqu’à rejouer le rebranchement de l’électricité pour sortir du parc, l’affrontement avec le gros méchant tyrannosaure et les vannes de l’incrédule Ian Malcolm. Rien de satisfaisant pour les fans de la première heure, qui ont de toute façon déjà vu le film un bon millier de fois, ni pour ceux de la dernière qui sont probablement confus par le flou scénaristique engendré par les questions éthiques autour du personnage de la petite Maisie Lockwood. Pourtant, on ne passe pas un affreux moment en compagnie de ces grosses bestioles, normalement disparues il y a des millions d’années. Après tout, je suis un être sensible, et mon petit cœur fond à la vue d’un nouveau dino tout mignon, la vraie star de cette nouvelle trilogie. Par ailleurs, l’idée d’amener progressivement la possibilité d’une cohabitation entre les hommes et les dinosaures est à la fois pertinente d’un point de vue métaphysique et excitante d’un point de vue scénaristique. On sort quand même de la salle en se demandant si ça valait bien la peine de dépenser des millions de dollars en effet spéciaux, en course de moto, en avions et en explosions pour alerter sur les catastrophes écologiques. Finalement, rien de vraiment nouveau, ni de « World », dans cet énième opus de la franchise jurassique, enfin, sauf si pour vous le monde se résume aux États-Unis et Malte.
Adrien Van Noort
Réalisé par Colin Trevorrow. Avec Chris Pratt, Bryce Dallas Howard, Laura Dern, Sam Neill, Jeff Goldblum… États-Unis. 02h26. Genres : Action, Aventure, Science-fiction. Distributeur : Universal Pictures International France. Sortie le 8 Juin 2022.
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